Une entreprise sociale offre des expériences vivantes et contribue directement à l’amélioration de l’accessibilité

Faciliter l’inclusion sociale aux personnes en situation de handicap cognitif n’est pas une recherche théorique selon la chercheuse de AGE-WELL, Virginie Cobigo. La professeure agrégée de l’Université d’Ottawa a lancé une entreprise qui partage les rétroactions de personnes vivant avec la démence ou en situation de handicap cognitif afin de savoir si les produits et les services sont utilisables et pratiques.

Virginie Cobigo

Appelée Open Collaboration pour l’accessibilité cognitive, l’entreprise en démarrage soutenue par AGE-WELL utilise cette approche inclusive pour améliorer la conception; des appareils et des sites Web à l’environnement qui nous entoure.

« C’est un rêve devenu réalité », affirme Mme Cobigo, directrice générale de l’entreprise, connue sous le nom d’Open. « Nous pouvons faire participer les personnes en situation de handicap cognitif en élaborant des solutions qui leur facilitent la vie. »

Depuis qu’elle est petite, elle souhaite faire une différence. Son frère aîné, Jean-Marc, a subi de graves lésions cérébrales à la suite d’un accouchement difficile. Il est décédé à l’âge de 10 ans, soit environ huit ans avant qu’elle naisse, mais « dans ma famille, nous avons appris l’importance de respecter et de prendre soin des personnes présentant une déficience intellectuelle ».

Mme Cobigo est devenue psychologue clinicienne spécialisée dans les handicaps cognitifs. Elle dit qu’AGE-WELL, le Réseau canadien axé sur les technologies et le vieillissement, « a vraiment appuyé mes recherches ». En effet, l’idée d’Open est venue directement d’un projet AGE-WELL qu’elle a réalisé en 2015 avec M. Jeffrey Jutai, un collègue de l’Université d’Ottawa, pour mettre au point une application de rappel de médicaments pour les personnes âgées vivant avec la démence ou en situation de handicap cognitif.

En travaillant sur l’application, Mme Cobigo a mis au point un moyen d’intégrer les personnes en situation de handicap cognitif au processus de recherche et de développement. Elle affirme que la collaboration AGE-WELL a été le « déclencheur » qui a mené à cette nouvelle approche.

« Je n’aurais pas envisagé cette approche, dit-elle. On m’a présenté un nouveau monde où mon expertise s’est avérée utile. »

Les concepteurs de technologies et les ingénieurs considèrent souvent qu’il est trop difficile de demander l’avis de personnes ayant des limitations cognitives pour évaluer les produits et les services, note-t-elle. Ils demandent plutôt l’avis de leurs proches aidants.

« Ce n’est pas suffisant, affirme Mme Cobigo, car les points de vue des proches aidants peuvent différer de ceux des personnes en situation de handicap cognitif. Nous devons exercer des pressions pour qu’ils participent directement à l’élaboration de solutions. » C’est une perspective qui correspond à l’engagement d’AGE-WELL. Il faut mobiliser les utilisateurs finaux dans tous les aspects de la recherche et du développement technologiques.

De gauche à droite : Hajer Chalghoumi et Fatoumata Bah

Chez Open, les personnes ayant diverses capacités cognitives agissent à titre de conseillers. Ils font des essais et améliorent l’accessibilité cognitive.

Selon Mme Cobigo, la clé consiste à « personnaliser » les interactions avec les conseillers. Cela peut signifier poser des questions plus simples, ajouter des déclencheurs de mémoire ou utiliser différentes méthodes de communication. Par exemple, certains conseillers préfèrent écrire les réponses plutôt que d’être interviewés, explique-t-elle.

Dans le cadre d’un deuxième projet AGE-WELL en 2017, Mme Cobigo a constaté que la meilleure façon de communiquer avec les concepteurs de technologies était de créer une entreprise « et de faire partie de leur monde, ce qui me permet ensuite de leur offrir des services d’une manière qui est crédible pour eux ». Un troisième projet en 2020 l’a aidé à fonder Open, grâce à des subventions d’AGE-WELL ainsi qu’à des subventions du Fonds Nouvelles frontières en recherche. Il est maintenant en marche. Au sein de son personnel, nous avons deux membres hautement qualifiés d’AGE-WELL (stagiaires), Hajer Chalghoumi, responsable des services, et Fatoumata Bah, responsable des communications. Open a une liste grandissante de clients tels que le gouvernement, l’industrie et le milieu universitaire.

Daniel Sauvé

Daniel Sauvé, 55 ans, est l’un des conseillers d’Open. M. Sauvé, qui vit avec l’autisme, a récemment obtenu un contrat pour un projet dans le cadre duquel il évalue l’utilisation d’un haut-parleur intelligent Echo Dot d’Amazon, mieux connu sous le nom d’« Alexa », pour améliorer les compétences sociales des personnes en situation de handicaps cognitifs.

M. Sauvé a reçu un ensemble d’activités à exécuter à l’aide du haut-parleur intelligent et a donné une rétroaction sur sa facilité d’utilisation et sur les moyens de l’améliorer. Il dit qu’il a eu du plaisir à tester l’appareil – en fait, un avantage considérable était sa capacité de raconter des blagues –, mais il a trouvé des contraintes, comme le fait qu’il est nécessaire de parler rapidement afin d’être compris. Il pense que ce serait un bon compagnon pour les gens qui n’ont pas beaucoup de contacts sociaux, mais il serait préférable que ce soit porté comme un bracelet plutôt que d’être placé à un point fixe dans la pièce.

M. Sauvé, qui travaille à temps partiel dans un supermarché et qui a un certificat en soutien technique en informatique, aime être un conseiller pour Open et il est heureux du fait qu’il pourrait avoir une incidence sur la conception et l’utilisation de produits comme le Echo Dot. « C’est bien de pouvoir faire une différence », dit-il.