L’isolement social et la solitude sont courants chez les personnes âgées, surtout pendant la pandémie de COVID-19. Mais ces problèmes ne sont pas toujours faciles à cerner. Et si la technologie pouvait aider?
Aki-Juhani Kyröläinen, boursier postdoctoral en linguistique et en langues à la McMaster University et à la Brock University en Ontario, voit l’effet de l’isolement social et de la solitude dans la langue utilisée par les personnes âgées. Le stagiaire d’AGE-WELL travaille sur deux applications logicielles qui identifient les « marqueurs linguistiques » de l’isolement social et de la solitude dans les histoires personnelles écrites par des personnes âgées.
Son objectif est de fournir aux aidants naturels et aux cliniciens un outil non invasif qui peut être utilisé pour prédire le degré d’isolement social et de solitude d’une personne âgée, facteurs qui peuvent augmenter la mortalité et avoir une incidence sur la santé cognitive et physique.
Les personnes âgées hésitent souvent à reconnaître qu’elles sont seules, souligne M. Kyröläinen. « On s’attend à ce que les gens soient satisfaits socialement. »
Leurs histoires « donnent un point de vue unique sur leur vie », explique-t-il.
Son approche exige que les personnes âgées écrivent de brefs récits axés sur un événement important de leur passé (lointain ou rapproché), et sur la façon dont elles s’attendent à ce que leur vie évolue à l’avenir.
M. Kyröläinen explique que les auteurs révèlent l’étendue de leur isolement social et de leur solitude à travers ces histoires. Par exemple, les personnes seules sont plus susceptibles d’utiliser un vocabulaire qui évoque des émotions extrêmes comme le bonheur ou la tristesse. Elles expriment également de l’incertitude et des hésitations lorsqu’elles parlent de l’avenir, utilisant plus souvent des mots comme « pourrait », « devrait » et « peut-être ». Ses apprentissages ont servi à développer une nouvelle application appelée WritLarge (en anglais seulement), qui invite les personnes âgées à enregistrer et à partager leurs histoires de vie. Les contributeurs sont anonymes et les récits sont disponibles pour exploration, ce qui favorise l’engagement social.
Cette première application permet également à l’équipe de recherche de M. Kyröläinen de continuer à recueillir des données sur les marqueurs linguistiques, pour une deuxième, qui devrait être lancée ce printemps. Elle traitera automatiquement ces histoires pour prédire le degré d’isolement social et de solitude d’une personne. M. Kyröläinen explique que les cliniciens et les aidants naturels pourraient utiliser cette deuxième application pour dépister l’isolement social et la solitude.
Il dit qu’il y a une différence entre l’isolement social, le nombre réel d’amis que quelqu’un a, ce qui est objectif, et la solitude, « la perception subjective de la personne de cet engagement social – ou de son absence, pour ainsi dire ».
Spécialiste de l’analyse quantitative à grande échelle de la langue, M. Kyröläinen est venu au Canada en provenance de la Finlande pour approfondir ses recherches sur l’évolution de la production et de la compréhension de la langue tout au long de la vie, sous la direction de M. Victor Kuperman, de la McMaster University.
Titulaire d’une bourse AGE-WELL – MIRA dans le cadre du programme de formation EPIC d’AGE-WELL, M. Kyröläinen affirme que les liens qu’il a établis par l’entremise d’AGE-WELL et du McMaster Institute for Research on Aging (MIRA) ont grandement contribué à étendre son réseau.
« On ne saurait trop insister sur la valeur du programme de formation EPIC, dit-il. Comme j’ai une formation en linguistique, cela m’a donné l’occasion d’intégrer des activités d’autres disciplines. » Selon lui, cela a « fourni de nouvelles approches et une toute nouvelle communauté ».