Jongler avec le travail et la prestation de soins

Il y a trois ans, Tammy était à bout.

Elle avait passé des années à jongler avec deux emplois tout en s’occupant de son mari, dont les problèmes de santé chroniques l’avaient laissé dans l’incapacité de travailler. L’épuisement émotionnel et physique a finalement déclenché une crise de santé mentale et elle a dû prendre un congé de trois mois.

« Je me suis essentiellement épuisée », confie-t-elle.

La situation de Tammy n’a rien d’exceptionnel. En effet, près du tiers des Canadiens sur le marché du travail s’occupent d’un membre de leur famille ou d’un ami, et la plupart travaillent à temps plein. Il est épuisant pour les personnes de composer avec la prestation de soins et leurs responsabilités professionnelles, sans compter qu’il y a un prix à payer pour les entreprises aussi. Collectivement, les employés soignants manquent 9,7 millions de jours de travail chaque année, ce qui représente 10 pour cent de la totalité de l’absentéisme déclaré pour la main-d’œuvre canadienne, et près de 560 000 d’entre eux quittent leur emploi pour prodiguer des soins.

Janet Fast, Université de l’Alberta

Janet Fast, Université de l’Alberta

Grâce au soutien d’une subvention d’AGE-WELL, Janet Fast cherche à déterminer si la technologie d’assistance peut être utile. Dans la première étude en son genre au Canada, elle a interrogé des employeurs et leurs employés soignants au sujet de la technologie d’assistance afin de contribuer à intégrer et à équilibrer les rôles de salarié et d’aidant naturel.

Mme Fast, professeure au Département d’écologie humaine à l’Université de l’Alberta, indique que bien des employés ne divulguent pas que leurs responsabilités d’aidants naturels interfèrent avec leur emploi parce qu’ils craignent les répercussions. Par conséquent, la plupart des employeurs ne sont pas conscients du nombre d’employés qui occupent ce double rôle. Ce fossé et ce manque de communication s’étend aussi à l’utilisation des technologies : 40 pour cent des employés estimaient que leur milieu de travail ne serait pas ouvert à l’utilisation de technologie d’assistance pour les aider à gérer leurs responsabilités; pourtant, la majorité des employeurs étaient en fait compréhensifs.

Certaines technologies d’assistance sont déjà en cours d’élaboration, comme des applis qui permettent aux soignants de trouver des renseignements personnalisés sur les services de soutien ou de créer un réseau de soignants familiaux ou professionnels et de partager de l’information et des données sur la santé. Une technologie révolutionnaire axée sur des capteurs est également en cours de développement par des chercheurs d’AGE-WELL. Elle permettrait à un aidant naturel de surveiller à distance ce qui se passe à la maison.

« Nous devons combler le fossé entre les employeurs et les employés pour qu’ils soient conscients de leurs besoins respectifs », déclare Mme Fast. Toutefois, nous devons également les mettre en contact avec les développeurs de produits qui ont la capacité d’innover et de créer de nouveaux produits et services qui répondront mieux aux besoins des soignants. »

Le réseau AGE-WELL, qui rassemble des intervenants afin d’élaborer des technologies et des services pour les aînés et les aidants naturels, est un point de départ tout indiqué. Mme Fast partagera ses conclusions dans l’ensemble du réseau. Elle est également en train d’établir un cercle de direction composé d’employeurs afin d’élaborer des stratégies, y compris des solutions technologiques, pour répondre aux besoins des employés soignants.

D’après Mme Fast, le fait que les employeurs estiment que la technologie d’assistance a le potentiel d’aider les employés est bon signe. « C’est très encourageant », dit-elle. « Ça veut dire qu’il y a probablement une place dans le marché. »